Juste de même en passant …
Pierre FOGLIA, La PRESSE, 24 mars 2011
LE NUCLÉAIRE
C'est l'histoire de deux mathématiciens spécialistes du calcul des probabilités qui sont assis à la terrasse d'un café. L'un lance à l'autre: je te parie 10$ que les 50 prochaines personnes qui passeront devant nous seront toutes des hommes (1).
Évidemment, l'autre s'empresse de parier. En spécialiste du calcul des probabilités, il évalue rapidement que les chances pour que 50 hommes passent sur le trottoir devant eux avant que ne passe une seule femme sont à peu près de l'ordre de une sur un million de milliards.
Si j'ai bien compris ce que nous expliquent les savants spécialistes du nucléaire que j'entends ces jours-ci à la télé et à la radio, les probabilités pour que se produise un vrai accident nucléaire - pas quelques petites fuites de rien du tout comme à Fukushima - sont à peu près du même ordre. Une sur un million de milliards.
Et selon ces mêmes savants experts, les antinucléaires sont à peu près aussi imbéciles que le mathématicien qui voulait parier que 50 hommes passeraient sur le trottoir avant que ne passe une seule femme.
Sauf que ledit mathématicien venait à peine de lancer son absurde pari qu'un bataillon de 200 fantassins a passé sur le trottoir en se rendant à une manoeuvre.
La probabilité pour qu'un bataillon passât sur le trottoir à ce moment de l'après-midi, devant ce café, était aussi de une sur un million de milliards.
Ainsi arrivera un accident nucléaire: nonobstant le fait qu'il ne devait pas arriver.
(1) L'auteur de l'histoire est Martin Gardner, célèbre mathématicien américain mort l'an dernier, qui voulait illustrer la frivolité des probabilités appliquées au réel. Elle est citée par Iegor Gran dans L'écologie en bas de chez moi. C'est là que je l'ai piquée.